Πολυτεκνική σύνταξη και προϋπόθεση ιθαγένειας

ΕΔΔΑ, απόφαση της 9.7.2009, ZEΪBEK κατά Ελλάδας με σημείωμα Α. Καϊδατζή

Πολυτεκνική σύνταξη και προϋπόθεση ιθαγένειας

Σύνθεση: N. Vajic, Πρόεδρος, Χρ. Ροζάκης, A. Kovler, E. Steiner, Kh. Hajiyev, G. Malinverni, Γ. Νικολάου, Δικαστές Νομικοί παραστάτες: Ι. Κούρτοβικ – Γ. Κανελλόπουλος (Σύμβουλος Ν.Σ.Κ.), Σ. Τρέκλη (Εισηγήτρια Ν.Σ.Κ.)

[…]EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. La requérante est née en 1951, réside à Xanthi et est au chômage.

6. En 1973, la requérante, citoyenne grecque de confession musulmane, épousa Hussein Zeibek, également citoyen grec de confession musulmane. En 1974, 1975, 1977 et 1982, la requérante donna naissance à quatre enfants, Ozour, Fatme, Aisel et Ilkai. A la naissance du quatrième enfant, elle devint mère de famille nombreuse au sens de l’article 1 de la loi no 1910/1944.

7. En janvier 1984, la requérante, accompagnée de sa famille, rendit visite à son père, à Istanbul. Pendant leur séjour, le mari de la requérante perdit son passeport et s’adressa au consulat grec afin d’obtenir un document officiel lui permettant de retourner en Grèce. Quelques mois plus tard, le consulat informa le mari de la requérante qu’il avait perdu sa nationalité grecque par une décision du ministre de l’Intérieur. Toutefois, la copie de la décision ne lui fut pas notifiée. Le 30 mai 1985, la requérante et ses enfants, qui possédaient des passeports grecs, revinrent en Grèce. Son mari les suivit un mois plus tard, en traversant illégalement la frontière.

8. La requérante fut alors informée que, par une décision du 22 novembre 1984, le ministre de l’Intérieur avait privé tous les membres de la famille Zeïbek de leur nationalité grecque, en application de l’article 19 du code de la nationalité en vigueur à l’époque (voir ci-dessous le droit interne pertinent). La décision indiquait que tous les membres de la famille avaient quitté le territoire grec et avaient installé le centre de leur vie familiale, sociale et économique à l’étranger, après avoir liquidé, le 30 décembre 1983, leur patrimoine mobilier et immobilier. Il en ressortait leur intention de ne plus revenir en Grèce.

9. Le 1er septembre 1995, la famille Zeïbek saisit le Conseil d’Etat d’un recours en annulation de la décision leur retirant la nationalité. Elle soutenait que la décision ne leur avait jamais été notifiée, que les faits sur la base desquels elle avait été prise étaient incorrects, que la décision n’était pas suffisamment motivée et qu’aucun membre de la famille n’avait été préalablement entendu.

10. Le 11 septembre 1996, le Conseil d’Etat déclara le recours irrecevable. Il releva que la décision attaquée avait été rendue le 22 novembre 1984 sur la base d’un rapport de police de Xanthi, selon lequel la famille Zeïbek avait vendu tous ses biens le 30 décembre 1983 et quitté la Grèce en janvier 1984. Par une requête du 10 novembre 1990, la famille avait demandé de récupérer la nationalité grecque en se fondant sur la décision du 22 novembre 1984, ce qui prouvait qu’au 10 novembre 1990 elle avait déjà pris connaissance de la décision. Toutefois, comme elle n’avait saisi le Conseil d’Etat que le 1er septembre 1995, le recours devait être rejeté comme tardif.

11. Le 25 octobre 1996, la famille Zeïbek introduisit une requête (no 34372/97) devant la Commission européenne des droits de l’homme. Elle invoquait plusieurs violations de la Convention et de ses Protocoles.

Le 21 mai 1997, la Commission déclara la requête irrecevable, au motif, notamment, qu’elle n’avait pas épuisé les voies de recours internes faute de s’être conformée aux exigences procédurales pour la saisine du Conseil d’Etat.

12. En 1998, l’article 19 du code de la nationalité fut supprimé. L’administration invita alors les membres de la communauté musulmane, qui avaient été privés de leur nationalité grecque, à postuler pour leur naturalisation ce que firent la requérante et sa famille le 4 novembre 1999.

13. Par une décision du 23 mai 2000, la nationalité grecque fut restituée à la requérante et à trois de ses quatre enfants, mais pas à son mari (en raison du fait que son casier judiciaire n’était pas vierge suite à des infractions au code de la route) et à l’une de ses filles (Ilkaï), qui était à la fois mineure, mariée et considérée ainsi comme étant sous la tutelle de son mari elle ne pouvait donc acquérir la nationalité grecque par le biais de sa mère. Toutefois, nulle décision de rejet ne fut portée à la connaissance d’Ilkaï par le service compétent.

14. Le 4 janvier 2001, Ilkaï introduisit une nouvelle demande de restitution de la nationalité. Le 9 juillet 2003, l’administration compétente l’informa que pour procéder à la naturalisation, elle devait déposer, entre autres justificatifs, un timbre fiscal de 1 467,53 euros. En 2003, Ilkaï saisit le médiateur qui, par un avis du 2 février 2004, conclut qu’il existait un problème de légalité concernant tant la procédure appliquée à Ilkaï que l’exigence de payer un timbre fiscal.

15. Le 19 décembre 2001, la requérante sollicita auprès d’un organisme de sécurité sociale une retraite à vie en tant que mère de famille nombreuse, conformément aux dispositions de l’article 63 de la loi 1892/1990, de l’article 18 § 9 de la loi 2008/1992 et de l’article 3 § 4 de la loi 2163/1993 (aux termes duquel pour fonder un droit à l’octroi des allocations, les enfants doivent avoir la nationalité grecque).

16. Par un acte du 22 novembre 2002, le directeur du département des allocations familiales rejeta sa demande. Il releva que les quatre enfants de la requérante n’étaient pas tous de nationalité grecque et que, par conséquent, les conditions exigées par la loi ne se trouvaient pas réunies.

17. La requérante forma un recours contre cette décision devant la commission du contentieux du département des allocations familiales. Le 22 octobre 2003, cette commission rejeta le recours pour les mêmes motifs.

18. Le 1er juin 2004, la requérante saisit le Conseil d’Etat. Elle soutenait qu’elle avait droit à une retraite à vie du fait qu’elle avait acquis la qualité de mère de famille nombreuse, au sens de la loi 860/1979, au moment de la naissance de son quatrième enfant et qu’elle était citoyenne grecque. Elle ajoutait qu’elle n’avait pas perdu cette qualité en dépit de la perte de la nationalité, car cette qualité était pérenne. Elle alléguait une violation des articles 21 de la Constitution (qui protège la famille et la maternité), 8 et 14 de la Convention et 1 du Protocole no 1.

19. Le 22 mai 2006, le Conseil d’Etat rejeta le recours. Il considéra que l’article 21 de la Constitution concernant les familles nombreuses ne peut jouer qu’en vue de la nécessité de préserver et promouvoir la nation grecque et ne concerne pas les familles d’étrangers domiciliées ou résidant en Grèce, et que les allocations prévues par l’article 63 de la loi 1892/1990 sont conçues comme une incitation des citoyens grecs à fonder des familles nombreuses afin de faire face au grave problème démographique du pays. L’octroi de ces allocations sur la base du critère de la nationalité des enfants ne méconnaît pas le principe d’égalité entre les mères ayant des enfants de nationalité grecque et les mères n’ayant pas d’enfants répondant à ce critère. En outre, l’article 3 § 4 de la loi 2163/1993 n’était pas contraire aux articles 8 et 12 de la Convention car il introduit une condition objective pour l’octroi de l’allocation aux mères de famille nombreuses mais ne dresse pas d’obstacle à la vie familiale ou à la création d’une famille. Il n’y avait pas non plus de discrimination fondée sur la religion car l’octroi de l’allocation dépendait non pas de la religion de l’intéressée mais du nombre et de la nationalité des enfants. Enfin, il n’y avait pas de violation de l’article 1 du Protocole no 1, car la requérante n’avait jamais réuni les conditions pour l’octroi de la retraite à vie : la famille de celle-ci avait en fait perdu la nationalité grecque en 1984 alors que ces allocations avait été établies par la loi 1892/1990.

20. Par une décision du 25 janvier 2007, le ministre de l’Intérieur révoqua la décision par laquelle Ilkaï avait été privée de sa nationalité grecque.

[…]EN DROIT[…]

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 1 DU PROTOCOLE No 1 PRIS ISOLEMENT ET COMBINÉ AVEC L’ARTICLE 14 DE LA CONVENTION

34. La requérante se plaint d’avoir été privée d’une pension de retraite en tant que mère de famille nombreuse. Elle invoque l’article 1 du Protocole no 1 pris isolément et en combinaison avec l’article 14 de la Convention précité :

« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. »

A. Sur la recevabilité

35. En premier lieu, le Gouvernement soutient que la requérante ne peut se prévaloir de l’existence d’un « bien » au sens de l’article 1 du Protocole no 1. La pension de mère de famille nombreuse ne constitue pas une allocation sociale ou une rémunération en relation avec une prestation de travail, mais une incitation, sous forme pécuniaire prévue dans le budget de l’Etat, pour faire face au problème démographique aigu de la Grèce.

36. La requérante soutient que si la pension de retraite n’a pas un caractère évident de rétribution, elle constitue cependant une sorte de rétribution pour les mères de familles nombreuses pour le travail précieux, quoique non rémunéré, qu’elles fournissent en tant que mères et qui les oblige à rester hors du marché du travail.

37. La Cour observe que le droit à pension n’est pas garanti comme tel par la Convention. Toutefois, elle rappelle également que selon sa jurisprudence, le droit à pension fondé sur l’emploi peut, dans certaines circonstances, être assimilé à un droit de propriété. Ce peut être le cas lorsque des cotisations particulières ont été versées (Gaygusuz c. Autriche, 16 septembre 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996-IV, §§ 39-41). Cela peut également être le cas lorsque l’engagement plus général a été pris de verser une pension à des conditions qui peuvent être considérées comme faisant partie du contrat de travail, comme dans le cas des pensions de retraite des fonctionnaires.

38. La Cour note qu’en 1982, au moment de la naissance de son quatrième enfant, Ilkaï, la requérante et tous les membres de sa famille avaient la nationalité grecque. En vertu des dispositions législatives alors en vigueur (article 1 de la loi no 1910/1944 et article 2 de la loi no 860/1979), la requérante avait la qualité de mère de famille nombreuse et pouvait donc prétendre à la pension de retraite à vie. Le retrait ultérieur de la nationalité grecque à tous les membres de la famille de la requérante, dans des conditions que la Cour examinera sous l’angle de la justification de l’ingérence, n’a pas fait perdre à celle-ci cette qualité. La Cour relève d’ailleurs que le Gouvernement admet que la requérante peut désormais introduire une nouvelle demande en vue d’obtenir la pension, puisqu’elle remplit toutes les conditions requises (paragraphe ci-dessous).

39. Enfin, la Cour note aussi que les termes employés par l’article 63 de la loi no 1892/1990 sont « pension de retraite à vie » ce qui exclut toute confusion avec une allocation quelconque.

40. Compte tenu du droit interne pertinent et de la situation de la requérante, la Cour considère que celle-ci a acquis un droit qui constituait un « bien » au sens de l’article 1 du Protocole no 1.

41. La Cour constate par ailleurs que le présent grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 de la Convention. Elle relève en outre que celui-ci ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de le déclarer recevable.

B. Sur le fond

42. Le Gouvernement soutient qu’à supposer même que la requérante disposait d’un « bien », le législateur avait soumis l’octroi de cette pension à certains critères. Or, les autorités compétentes ont estimé qu’à la date de sa demande, la requérante ne remplissait pas tous les critères requis, en raison notamment du fait qu’Ilkaï était déjà mariée. Le Gouvernement ajoute que, la décision retirant la nationalité à Ilkaï ayant été révoquée, la requérante peut déposer une nouvelle demande pour obtenir la pension, puisqu’elle remplit désormais toutes les conditions requises à cet égard.

43. La requérante souligne que le retrait de la nationalité aux membres de sa famille, en application de l’article 19 du code de la nationalité, a eu une incidence sur ses griefs sous l’angle de l’article 1 du Protocole no 1. Elle affirme faire partie de 46 638 musulmans, vivant pour la plupart en Thrace, dont la nationalité a été retirée entre 1955 et 1996. La plupart d’entre eux n’ont pas été informés du fait qu’une procédure était engagée pour leur retirer la nationalité, et ce n’est qu’à l’occasion d’une demande de passeport ou d’un certificat de naissance qu’ils ont eu connaissance de la décision de retrait elle-même. Le recours au Conseil d’Etat constituait un « luxe » inaccessible à ces paysans de Thrace qui n’avaient pas de moyens suffisants pour le saisir. Quelques recours en annulation tentés devant cette juridiction ont été rejetés comme tardifs, au motif que le délai de soixante jours à compter de la publication de la décision était révolu.

44. La requérante prétend que les autorités ont refusé de lui accorder le bénéfice de la pension au prétexte de la perte de la nationalité grecque de sa fille, mais la véritable raison du refus réside dans le fait qu’elles sont toutes deux de confession musulmane.

45. La Cour estime que le refus d’accorder à la requérante une pension de retraite en tant que mère de famille nombreuse constituait une atteinte à son droit de propriété et que celle-ci ne correspondait ni à une expropriation ni à une mesure de réglementation de l’usage des biens elle doit donc être examinée sous l’angle de la première phrase du premier alinéa de l’article 1. Aussi convient-il de déterminer si un juste équilibre a été ménagé entre les exigences relatives à l’intérêt général de la société et les impératifs liés à la protection des droits fondamentaux de l’individu.

46. Selon la jurisprudence de la Cour, une distinction est discriminatoire au sens de l’article 14, si elle « manque de justification objective et raisonnable », c’est-à-dire si elle ne poursuit pas un « but légitime » ou s’il n’y a pas de « rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ». Par ailleurs, les Etats contractants jouissent d’une certaine marge d’appréciation pour déterminer si et dans quelle mesure des différences entre situations analogues à d’autres égards justifient des distinctions de traitement. Toutefois, seules des considérations très fortes peuvent amener la Cour à estimer compatible avec la Convention une différence de traitement exclusivement fondée sur la nationalité (Gaygusuz c. Autriche précité, § 42).

47. La Cour a déjà relevé qu’à la date de la naissance d’Ilkaï, les membres de la famille de la requérante avaient la nationalité grecque. La requérante était donc considérée comme une mère de famille nombreuse. Selon l’article 2 de la loi no 860/1979, cette qualité est en principe conservée à vie, ce que le Conseil juridique de l’Etat a par ailleurs confirmé, même au cas où certains des enfants auraient cessé de faire partie de la famille. De plus, par un arrêt no 2654/2000, le Conseil d’Etat a jugé que l’octroi d’une pension de retraite à vie aux mères de famille nombreuse, de nationalité grecque et résidant de manière permanente et légale en Grèce, n’était pas conditionné par la nationalité de leurs enfants.

48. La Cour note, en outre, que, par une décision du 22 novembre 1984 prise par le Ministère de l’intérieur, la famille de la requérante a été privée de la nationalité grecque à l’occasion d’un voyage qu’elle avait effectué en Turquie. Cette décision, qui n’a jamais été notifiée à la requérante, ni à aucun autre membre de sa famille, précisait se fonder sur un rapport de police selon lequel la famille de la requérante avait définitivement quitté le territoire pour s’installer en Turquie. Elle a été prise en vertu de l’article 19 du code de la nationalité, qui visait « toute personne d’origine étrangère », et a été systématiquement appliqué pendant une longue période aux ressortissants grecs de confession musulmane, comme la famille de la requérante. Suite à la suppression de cet article en 1998, la requérante et trois de ses enfants se sont vus restituer la nationalité grecque en mai 2000, à l’exception d’Ilkaï qui était à la fois mineure et mariée, et considérée ainsi comme étant sous la tutelle de son mari.

49. S’il est vrai, comme l’a souligné le Conseil d’Etat dans son arrêt du 22 mai 2006, que la famille de la requérante a perdu la nationalité grecque en 1984 alors que cette pension avait été établie par la loi no 1892/1990, la requérante a été rétablie dans sa nationalité en mai 2000. Elle a sollicité la pension en décembre 2001 et les autorités l’ont refusée en novembre 2002. Or, la Cour constate qu’à cette dernière date non seulement la loi no 1982/1990 était déjà en vigueur, mais le Conseil d’Etat avait aussi rendu ses arrêts no 2654/2000 et no 1095/2001, qui étaient en principe favorables à la requérante. Il en ressort que si la requérante et certains membres de sa famille ont été rétablis dans leur nationalité, celle-ci n’a pas été rétablie dans tous les droits qui en découlaient, comme pour toutes les familles nombreuses grecques. Ce rétablissement aurait impliqué la reconnaissance à la requérante de la qualité de mère de famille nombreuse et des avantages y relatifs, comme si ce retrait de nationalité n’avait jamais eu lieu. A supposer même qu’on puisse admettre, comme le soutient le Gouvernement, qu’à la date de la demande de la requérante celle-ci ne remplissait pas les conditions légales en raison du fait qu’Ilkaï ne possédait pas la nationalité grecque, la Cour relève que la procédure que celle-ci a dû engager pour la récupérer était entachée d’illégalité selon les conclusions du médiateur (paragraphe 14 ci-dessus).

50. Dans ce contexte, et eu égard à l’importance qu’accordent tant la Constitution, par l’existence d’une disposition spécifique, que le législateur, à la protection des familles nombreuses, la Cour s’étonne que dans son arrêt, dans le cas de la requérante, le Conseil d’Etat associe l’octroi de cette protection accordée par la Constitution à « la nécessité de préserver et promouvoir la nation grecque », un critère fondé non pas sur la nationalité grecque mais sur l’origine nationale.

51. La Cour estime que la requérante a subi une différence de traitement qui ne reposait sur aucune « justification objective et raisonnable », ainsi qu’une charge excessive et disproportionnée qui a eu pour effet de rompre le juste équilibre devant être ménagé entre les exigences relatives à l’intérêt général de la société et les impératifs liés à la protection des droits fondamentaux de l’individu.

52. Partant, il y a eu violation de l’article 1 du Protocole no 1 pris isolément et combiné avec l’article 14 de la Convention.

[…]

Για το πλήρες πρωτότυπο κείμενο της απόφασης στα γαλλικά (Ευρωπαϊκό Δικαστήριο των Δικαιωμάτων του Ανθρώπου):

http://cmiskp.echr.coe.int/tkp197/portal.asp?sessionSimilar=44973738&skin=hudoc-en&action=similar&portal=hbkm&Item=3&similar=frenchjudgement

Για την επίσημη μετάφραση της απόφασης στα ελληνικά (Νομικό Συμβούλιο του Κράτους): http://www.nsk.gr/edad/ee616.pdf

Σημείωμα

Ίσως το πιο χαρακτηριστικό σημείο στην απόφαση είναι η αποστροφή, στη σκέψη 50, ότι «το Δικαστήριο εκφράζει την έκπληξή του» [la Cour s’étonne] για την υπόθεση που έφτασε ενώπιόν του.

Η υπόθεση αφορά την άρνηση χορήγησης πολυτεκνικού επιδόματος, της ισόβιας σύνταξης πολύτεκνης μητέρας, σε Ελληνίδα μουσουλμάνα της Θράκης με τέσσερα παιδιά, το ένα από τα οποία είχε στερηθεί την ελληνική ιθαγένεια. Ο νόμος (άρθρο 63 του ν. 1892/1990) είναι στο σημείο αυτό σαφής: η χορήγηση του επιδόματος εξαρτάται από την ελληνική ιθαγένεια (όλων) των παιδιών. Καθόλου σαφής, αντίθετα, όπως επισημαίνει και το Δικαστήριο, δεν υπήρξε στη συγκεκριμένη περίπτωση ούτε ο τρόπος με τον οποίο τα μέλη της οικογένειας της προσφεύγουσας στερήθηκαν, κατ’ εφαρμογή του περιβόητου άρθρου 19, την ελληνική ιθαγένεια ούτε, πολύ περισσότερο, ο λόγος για τον οποίον αποκαταστάθηκε η ιθαγένεια της μητέρας και των τριών παιδιών, αλλά όχι και του τέταρτου.

Το Συμβούλιο της Επικρατείας, στο οποίο η πολύτεκνη προσέφυγε, απέρριψε την αίτησή της, κρίνοντας ότι δεν αντίκειται στο Σύνταγμα η εξάρτηση της χορήγησης πολυτεκνικών παροχών από την προϋπόθεση της ιθαγένειας. Για το Συμβούλιο, η συνταγματική προστασία της πολύτεκνης οικογένειας (παρ. 2 του άρθρου 21 Συντ.) εντάσσεται στο ευρύτερο πλαίσιο της συνταγματικής προστασίας της οικογένειας ως θεμελίου της συντήρησης και προαγωγής του ελληνικού έθνους (παρ. 1 του ίδιου άρθρου) και συνεπώς δεν αναφέρεται σε οικογένειες αλλοδαπών που ζουν στην Ελλάδα, ενώ οι πολυτεκνικές παροχές έχουν το χαρακτήρα κινήτρου για την αντιμετώπιση του δημογραφικού προβλήματος (ΣτΕ 1489/2006, ΕΔΔΔ 2008, σ. 498, ομοίως ΣτΕ 771/2007, ΕφημΔΔ 2007, σ. 627 = ΤοΣ 2008, σ. 217 επ., με παρατηρήσεις Ι. Παπαγεωργίου, κ.ά.).

Ένας απόλυτος αποκλεισμός από ορισμένο πεδίο κοινωνικής προστασίας, με αποκλειστικό κριτήριο την ιθαγένεια, δεν μπορεί παρά να προβληματίζει όσον αφορά τη συμβατότητά του προς το Σύνταγμα και το διεθνές δίκαιο (βλ. Ακρ. Καϊδατζή, Κοινωνικές παροχές και ιδιότητα του πολίτη: Η αντισυνταγματικότητα του αποκλεισμού αλλοδαπών από τη χορήγηση πολυτεκνικών επιδομάτων, ΕφημΔΔ 2007, σ. 629 επ., Ι. Παπαγεωργίου, Πολυτεκνικό επίδομα και αναγνωρισμένοι πρόσφυγες στην Ελλάδα, ΘΠΔΔ 2008, σ. 140 επ.). Οι πολυτεκνικές παροχές έχουν πράγματι χαρακτήρα κινήτρου για την εξυπηρέτηση δημογραφικών σκοπών, το δημογραφικό όμως δεν είναι εθνοφυλετικό, αλλά κοινωνικό ζήτημα. Η προστασία, επομένως, των πολύτεκνων οικογενειών, συνταγματική και νομοθετική, δεν εξυπηρετεί τόσο, και πάντως όχι μόνο, την «προαγωγή του ελληνικού Έθνους», αλλά έχει πρωτίστως προνοιακό χαρακτήρα. Κατά τούτο, η παρ. 2 του άρθρου 21 Συντ. δεν προστατεύει ειδικά μόνο τους Έλληνες πολύτεκνους, αλλά τους πολύτεκνους που ζουν στην Ελλάδα. Ευρύτερα, τα κοινωνικά δικαιώματα αποσκοπούν στην προστασία του κοινωνικού ανθρώπου, του ανθρώπου ως μέλους του κοινωνικού συνόλου, δηλαδή του κοινωνικού –και όχι μόνο του Έλληνα– πολίτη (βλ. Ακρ. Καϊδατζή, Κοινωνικά δικαιώματα, ιδιότητα του πολίτη και μετανάστες, σε: ΙΜΕΠΟ, Μετανάστευση στην Ελλάδα: Εμπειρίες, πολιτικές, προοπτικές, τόμ. B΄, 2008, σ. 70 επ.).

Με τη σχολιαζόμενη απόφαση, το Ευρωπαϊκό Δικαστήριο των Δικαιωμάτων του Ανθρώπου έρχεται να ανατρέψει μιαν ατυχή πρακτική του ελληνικού κράτους, υπεύθυνος για την οποία –ας μη το ξεχνάμε– είναι πρωτίστως ο νομοθέτης, που θέσπισε τη δυσμενή διάκριση στην απόληψη των πολυτεκνικών παροχών, και πολύ λιγότερο ο δικαστής, που την ανέχθηκε. Ανεξάρτητα πάντως απ’ τη συγκεκριμένη υπόθεση, το ιδιαίτερο ενδιαφέρον της απόφασης έγκειται στο ότι εντάσσεται σε μιαν ευρύτερη τάση του Δικαστηρίου του Στρασβούργου τα τελευταία χρόνια –την οποία και επιβεβαιώνει με πολύ ξεκάθαρο τρόπο–, την επέκταση δηλαδή της δικαιοδοσίας του σε θέματα κοινωνικών παροχών, παρά την απουσία κοινωνικών δικαιωμάτων στη Σύμβαση, μέσω μιας διευρυμένης έννοιας ιδιοκτησίας (άρθρο 1 του Πρώτου Πρωτοκόλλου) σε συνδυασμό με την απαγόρευση διακρίσεων (άρθρο 14 ΕΣΔΑ). Ιδίως η τελευταία διάταξη, που μάλλον φειδωλά έχει ως τώρα χρησιμοποιηθεί από το Δικαστήριο, αναδεικνύεται έτσι, εν δυνάμει, σε προνομιακό πεδίο για τον έλεγχο του περιορισμού εθνικών κοινωνικών δικαιωμάτων (βλ. ιδίως Στ. Κτιστάκη, Οι κοινωνικές παροχές υπό το πρίσμα της ΕΣΔΑ, ΘΠΔΔ 2009, σ. 657 επ., επίσης Γ. Κατρούγκαλου, Θεσμοί κοινωνικής πολιτικής και προστασία των κοινωνικών δικαιωμάτων σε διεθνές και εθνικό επίπεδο, 2009, σ. 67 επ.).